Le projet de tunnel ferroviaire sous le détroit de Gibraltar, entre le Maroc et l'Espagne, est un maillon essentiel du développement d'un réseau de transport terrestre euro-africain. Mais le coût exorbitant et le défi technologique ont toujours été des obstacles à son lancement.
L'idée d'un tunnel ferroviaire sous-marin sous le détroit de Gibraltar revient sur le devant de la scène.
Le sujet était au cœur d'une vidéoconférence organisée mercredi 21 avril entre le ministre marocain de l'Equipement, du Transport, de la Logistique et de l'Eau, Abdelkader Amara, et le ministre espagnol du Transport, de la Mobilité et de l'Agenda urbain, Jose Luis Abalos, rapporte l'Agence marocaine d'information (MAP).
Projet cher au royaume chérifien, Abdelkader Amara a indiqué que sa réalisation permettrait de relier non seulement deux pays, mais aussi deux continents, soulignant que le Maroc servirait de lien entre l'Europe et l'Afrique.
Le dossier reviendra sur la table dans les prochains mois lorsque la capitale marocaine accueillera une réunion de haut niveau entre les deux pays.
Le projet d'une liaison fixe entre le Maroc et l'Espagne via le détroit de Gibraltar remonte au 20e siècle.
La volonté des deux pays s'est concrétisée le 24 octobre 1980, lorsque les deux gouvernements ont signé un accord, créant, d'une part, une commission mixte hispano-marocaine qui est l'organe directeur du projet, et d'autre part, deux sociétés d'études publiques, chargées d'exécuter les plans de travail approuvés par la commission mixte :
la Sociedad Nacional de Estudios del Estrecho de Gibraltar (SNED) à Rabat et la Sociedad Espanola de Estudios para la Comunicacion Fija a traves del Estrecho de Gibraltar, S.A. (SECEGSA) à Madrid.
L'avancement du projet
À ce jour, les développements les plus avancés sur ce dossier en sont au stade des études de faisabilité. En 2006, les ingénieurs impliqués dans le projet ont déclaré que le tunnel pourrait être mis en service d'ici 2025, sous réserve de la faisabilité technique.
Fin 2006, le bureau d'ingénieurs suisse Lombardi Engineering Ltd a été sélectionné pour concevoir le tunnel.
Les études préliminaires ont été achevées en 2008. Le projet consiste à relier Tarifa (Espagne) et Malabata (région de Tanger) par un tunnel ferroviaire sous-marin, l'Afrotunnel, long de 38 kilomètres, dont 28 sous la mer à une profondeur de 400 mètres (une profondeur supérieure à celle du tunnel sous la Manche).
Selon un scénario tendanciel, le trafic à travers le tunnel est estimé pour 2030 à 10 millions de passagers et 7 millions de tonnes de marchandises, et selon le scénario favorable, dit "association des pays du Maghreb à l'Union européenne et croissance en Europe", à 13 millions de passagers et 9 millions de tonnes de marchandises.
La Banque mondiale, la Banque européenne d'investissement (BEI), le Fonds africain de développement et certains fonds arabes auraient manifesté leur intérêt pour le projet.
Mais en mai 2009, un rapport du Conseil économique et social des Nations unies a souligné les difficultés techniques du projet et les incertitudes quant à sa viabilité économique.
Il a recommandé que des études supplémentaires soient entreprises pour évaluer ces difficultés et donc l'opportunité d'entreprendre des investissements plus importants.
Cette même position est soutenue par une frange d'acteurs de la société civile des deux pays, qui s'interrogent sur la pertinence du projet, d'autant que la liaison maritime entre le port de Tanger Med et celui d'Algesiras en Espagne prend environ 30 minutes de bateau.